Le Départ (Claudel)


_Ce n'étaient pas là vos grandes et gracieuses manières.

Vous qui n'avez de rien d'autre à vous repentir, n'avez-vous pas, mon amour,
regret de cette après-midi de juillet où vous partites avec une soudaine,
inintelligible phrase et un oeil effrayé, pour ce voyage si long sans aucun
baiser et nul adieu?
Je savais bien cependant que vous alliez partir tout à l'heure,
et nous étions assis dans les rayons du soleil déclinant,
vous me murmurant tout bas, car votre voix était faible,
ce merci qui me faisait mal.
Tout de même ç'était bon d'entendre ces choses,
et je pouvais dire ce qui
rendait vos yeux pleins d'amour une croissante ombre,
comme quand le vent
du Sud approfondit le noir feuillage.

_Et ç'était bien vos grandes et gracieuses manières

que de tourner le discours ainsi sur les choses de tous les jours,
ma chérie, élevant pour l'éclair d'un sourire ces lumineuses,
pathétiques paupières.
Tandis que je m'approchais davantage,
car vous parliez si bas que je ne pouvais à peine entendre.
Mais tout d'un coup me laisser ainsi à la fin, effaré de surprise plus que
de la perte, avec une phrase pressée, inintelligible, et un oeil effrayé, et
partir ainsi pour votre voyage d'à jamais avec pas un seul baiser et pas adieu,
et le seul regard sans amour celui dans lequel vous passâtes,

_Çe n'était pas du tout vos grandes et gracieuses manières.

Paul Claudel

Um comentário:

PE. JORGE RIBEIRO disse...

FANTASTICO POEMA DI CLAUDEL, ESUBERANTE E PROFONDO...

Pra se pensar ....

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